Le travail pénitentiaire

Travailler en détention est un droit pour les personnes détenues qui le souhaitent. L’activité professionnelle est fondamentale pour la réinsertion future des personnes incarcérées. Elle leur permet aussi de s’assurer une rémunération pour indemniser les victimes, préparer leur sortie, aider leurs familles et améliorer leur quotidien en détention.

Le travail pénitentiaire existe sous différentes formes :

  •  Le service général : les personnes détenues participent à l’entretien et au fonctionnement de la prison (entretien, restauration, blanchisserie…)
  •  Les ateliers du service de l’emploi pénitentiaire (SEP), géré par l’ATIGIP
  •  Le travail en production : les personnes détenues travaillent pour le compte d’entreprises ou d'associations extérieures (structures d'insertion par l'activité économique - SIAE) qui installent un atelier en détention.

Les personnes détenues peuvent également travailler pour leur propre compte.

Chaque mois, plus de 20 000 personnes détenues travaillent dont plus de la moitié au service général et les autres au sein des ateliers.

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Au sommaire

  • Les ateliers du service de l'emploi pénitentiaire
  • Les ateliers de production
  • La gestion déléguée
  • Le travail au service général de l'établissement
  • Le cadre juridique du travail en prison
  • Responsabilité sociétale de l'entreprise (RSE) et label PeP.s
  • L'insertion par l'activité économique (IAE) en détention
  • Les entreprises adaptées au milieu pénitentiaire

Le service de l'emploi pénitentiaire

Le Service de l’emploi pénitentiaire (SEP), créé en 1998, est devenu en décembre 2018 un service de l’ATIGIP. Il gère la Régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP), qui existe au sein des établissements pénitentiaires depuis 1951.

Via le SEP, l'ATIGIP est chargée d'organiser la production de biens et de services par des personnes détenues et d’en assurer la commercialisation

En 2021, elle gérait 51 ateliers. Elle y propose aux personnes détenues des emplois formateurs, favorisant l'acquisition de compétences dans des domaines porteurs (numérique, développement durable, métallerie, travail du bois, service aux entreprises...).

en chiffres

Via le Service de l’emploi pénitentiaire, l’Agence du TIG et de l’insertion professionnelle :

  •  gère 51 ateliers dans 29 établissements pénitentiaires
  •  emploie chaque année plus de 2 000 personnes détenues sur 1 200 postes de travail
  •  30 millions d'euros de chiffre d’affaires, 3,6 millions d’euros de salaire et près de 2 millions d’euros d’investissements dans les établissements (2021)

Les ateliers de production

Les personnes détenues peuvent travailler pour le compte de donneurs d'ordre extérieurs à l'administration pénitentiaire : entreprises privées concessionnaires, structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) ou entreprises adaptées, au sein d'ateliers installés dans les prisons. Les activités en atelier peuvent couvrir un large spectre :

  • - dans le secteur industriel : métallurgie, menuiserie, confection, textile, assemblage, recyclage, conditionnement...
  • - dans le secteur des services : programmation web, numérisation, centre d'appel

L’État accroît actuellement l’offre d’emploi et diversifie les activités proposées aux personnes détenues, en particulier dans des domaines porteurs comme le numérique ou le développement durable.

personne en train de souder

Répartition des rôles :

Depuis le 1er mai 2022 et l'entrée en vigueur de la réforme du travail pénitentiaire :

L’administration pénitentiaire :

  • - classe les personnes détenues au travail (c'est-à-dire qu'elle les autorise à travailler, sur un ou plusieurs régimes de travail); les entreprises peuvent ensuite sélectionner leurs opérateurs parmi les personnes détenues classées, au terme d'un processus de sélection
  • - prépare les contrats d'emploi pénitentiaires (CEP) signés par le donneur d'ordre et le travailleur détenu, établit les bulletins de salaire et verse les rémunérations et les prélèvements sociaux, qu'elle facture ensuite au donneur d'ordre
  • - met à disposition gratuitement les locaux industriels adaptés à l’activité du donneur d'ordre
  • - assure la surveillance des travailleurs détenus et garantit la sécurité

Le donneur d'ordre :

  • - sélectionne les personnes détenues qui travailleront pour son compte et sous sa direction, parmi les personnes classées au travail par l'administration et ayant candidaté sur les postes proposés par ce donneur d'ordre
  • - apporte ses matériels de production et équipe les locaux attribués.
  • - assure le contrôle qualité de la production et l’encadrement technique des personnes détenues.
  • - le cas échéant, met fin à la relation de travail avec la personne détenue
  • - rembourse à l'établissement pénitentiaire l'ensemble des salaires et charges afférents à son activités.

Les relations entre le donneur d'ordre et l'établissement pénitentiaire sont régies par un contrat d'implantation.

en chiffres

  •  Environ 7 000 personnes détenues travaillent chaque mois dans l'un des 400 ateliers de concession répartis en France.
  •  Près de 24,7 millions d’euros sont versés en salaires en 2021.

Dans les établissements en gestion déléguée, c’est-à-dire les établissements dont la gestion est confiée par l’Etat à une entreprise privée, c’est l’entreprise délégataire qui organise l’activité de travail en détention, aussi bien au service général que pour les concessions.

La gestion déléguée

Dans un certain nombre d'établissements pénitentiaires, l'Etat délègue à des entreprises privées, par le biais d'un marché public ou d'un contrat de partenariat, tout ou partie des missions non-régaliennes de leur gestion : restauration, maintenance des locaux ou encore la gestion du travail des personnes détenues, au service général ou en production.

Dans les établissements dans lesquels le travail en production est délégué à une telle entreprise, cette dernière organise ce travail, à l'instar des entreprises concessionnaires

Le service général

Le service général désigne l’ensemble des emplois occupés par des personnes détenues contribuant au fonctionnement des établissements pénitentiaires : maintenance des locaux, restauration, entretien des lieux de vie collective...

en chiffres

  •  11 000 personnes détenues travaillent chaque mois au service général
  •  Plus de 34,6 millions d’euros versés en salaires en 2021

Le cadre du travail en prison

La réforme du travail pénitentiaire, instaurée par la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire du 22 décembre 2021, rénove le statut des détenus travailleurs, pour le rapprocher de celui des travailleurs libres. Elle institue une relation contractuelle directe entre la personne détenue qui travaille et le donneur d'ordre qui l'emploie, l'administration pénitentiaire veillant à ce que cette relation s'inscrive dans un parcours d'insertion professionnelle de la personne détenue. Les droits de la personne détenue au travail sont renforcés.

L'objectif est de maintenir au maximum le lien avec la société, en proposant aux personnes détenues des emplois qualidiants et adaptés au marché du travail et, in fine, prévenir la récidive.

Le contrat d'emploi pénitentaire (CEP)

Avec l'entrée en vigueur du CEP depuis le 1er mai 2022, la loi consacre un certain nombre de droits au bénéfice des travailleurs détenus : durée du contrat, période d'essai, durée du travail, etc... Ce contrat sécurise la relation de travail entre le donneur d'ordre (établissement ou opérateur économique) et la personne détenue.

La rémunération

La rémunération minimale des personnes détenues est définie par l’article D. 412-64 du code pénitentiaire. Pour le travail de production, elle s’élève à 45% du Smic horaire. L’organisation, les méthodes et les rémunérations du travail doivent se rapprocher le plus possible de celles des activités professionnelles extérieures.
L'ATIGIP rémunère en moyenne les personnes détenues à 5,44 € brut de l’heure, soit 19% au-dessus du seuil minimal de rémunération.

Protection sociale

En production, le donneur d'ordre et la personne détenue doivent s'acquitter, pour l'assurance vieillesse, du versement de cotisations sociales aux mêmes taux que les employeurs et salariés en milieu libre, ainsi que du versement de la CSG, de la CDS et de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA). Cela permet aux personnes détenues d'ouvrir des droits à la retraite dont ils pourront bénéficier dès lors qu'ils y seront éligibles.

En revanche, les cotisations de maladie-maternité (part patronale) font l'objet d'un taux inférieur au droit commun la prise en charge sanitaire étant intégralement prise en charge par le ministère des Solidarités et de la Santé par le biais des unités sanitaires en milieu pénitentiaire. Les cotisations pour le risque accidents du travail et maladie prodessionnelle (ATMP) font l'objet d'un taux fixe applicable à l'ensemble du travail des personnes détenues.

La durée du travail

Les personnes détenues bénéficient des mêmes droits que les travailleurs libres s'agissant des repos et des jours fériés. A compter de la mise en place du futur logiciel de paye des personnes détenues, Octave, ces dernières bénéficieront d'une durée du travail inscrite au contrat d'emploi pénitentiaire allant de 10 heures à 35 heures hebdomadaires.

Hygiène et sécurité

Les règles d’hygiène et de sécurité de droit commun sont applicables au travail en détention. L'administration pénitentiaire fait appel à l'inspection du travail chaque année, de manière systématique.

Responsabilité sociétale de l'entreprise et label PeP.s : Produit en Prison.s

Proposer du travail aux personnes détenues, c'est jouer pleinement son rôle d'acteur engagé et démontrer la responsabilité sociétale de l'entreprise. Les entreprises qui proposent du travail en prison contribuent à la réinsertion durable de personnes incarcérées qui retrouveront un jour la société civile, participant à la prévention contre la récidive et à la sécurité de tous. Elles peuvent aussi mettre en avant une production de proximité qui limite l'impact environnemental.

Pour valoriser le travail des personnes détenues et les entreprises qui apportent du travail en prison, l’ATIGIP a créé le label PePs. Ce label a pour but de :

  • - faire connaître et de valoriser le travail en détention ;
  • - montrer la qualité et la diversité des services et produits réalisés par des personnes détenues ;
  • - valoriser les acteurs (entreprises, structures de l’insertion par l’activité économique, service de l’emploi pénitentiaires…) qui font réaliser ces produits dans des conditions éthiques et responsables ;
  • - impulser une amélioration progressive du travail en détention, notamment en attirant de nouvelles entreprises, proposant des emplois plus qualifiants.

Ce label démontre l’engagement responsable et sociétal des entreprises labellisées, qui s’engagent par une charte à proposer un travail formateur dans des conditions dignes et responsables et à soutenir la réinsertion professionnelle des personnes qu’elles emploient.

Zoom sur l’insertion par l’activité économique (IAE) en détention

L’insertion par l’activité économique (IAE) est un excellent outil pour développer l’activité professionnelle en prison et la réinsertion des personnes détenues. Après une expérimentation menée avec succès depuis 2016, le ministère de la Justice et le ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion se mobilisent pour son déploiement.

Les structures d’insertion par l’activité économique ont pour mission de permettre aux personnes les plus éloignées du marché du travail de bénéficier d’une remise au travail et d’un accompagnement social et professionnel individuel renforcé pour faciliter leur insertion professionnelle. Elles constituent un tremplin vers le marché du travail « classique ».

Les SIAE produisent le même type de biens et de services que les entreprises classiques. Elles se positionnent également sur des productions innovantes et contribuent ainsi au développement économique des territoires. Ces structures spécialisées sont conventionnées par l’Etat et reçoivent un financement couvrant en partie l’accompagnement socio-professionnel et l’encadrement technique adapté.

Le secteur de l’insertion par l’activité économique est aujourd’hui composé de plus de 4 000 entreprises et associations, répartis entre différentes formes de structures :

  • - les ateliers et chantiers d’insertion (ACI)
  • - les entreprises d’insertion (EI)
  • - les associations intermédiaires (AI)
  • - les entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI)
  • - les entreprises d'insertion par le travail indépendant (EITI)

En 2016, le ministère de la Justice et le ministère du Travail ont lancé une expérimentation conjointe pour permettre d’implanter des structures d’insertion en établissements pénitentiaires. 6 projets d’implantation de structures d’insertion en prison ont alors vu le jour :

Une évaluation a été conduite en 2019 qui a permis de confirmer la plus-value des SIAE en milieu pénitentiaire pour l’insertion des personnes détenues et d’envisager son déploiement sur l’ensemble du territoire national.

Le pacte d’ambition pour l’insertion par l’activité économique (IAE), rendu à la ministre du Travail en septembre 2019, désigne les personnes placées sous-main de justice (PPSMJ) comme public prioritaire pour bénéficier de l’IAE et vise le déploiement de l’IAE en détention dans un maximum d’établissements pénitentiaires d’ici 2022. L’ATIGIP et la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) pilotent le déploiement des structures d’insertion par l’activité économique en détention.

Depuis, 11 nouvelles SIAE ont pu débuter une activité en détention, portant le nombre de SIAE implantées en établissements pénitentiaires mi 2022 à 17.

L’implantation des structures d’insertion par l’activité économique (SIAE) dans les établissements pénitentiaires offre aux personnes détenues un outil de réinsertion qui leur propose un accompagnement social et professionnel, en lien avec celui proposé par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) dans le cadre du parcours d’exécution de peine. Il permet dès l’incarcération un travail renforcé, sur un projet professionnel et sur la levée des difficultés sociales qui sont un frein au retour à l’emploi. Le travail au sein des ateliers d’insertion permet également l’acquisition des codes professionnels et l'accès à un parcours de formation et de qualification pour les personnes détenues.

A travers ce dispositif, il s’agit d’ouvrir aux personnes détenues les plus en difficulté l’accès aux SIAE dans le cadre d’un parcours d’insertion initié au sein de l’établissement pénitentiaire et se poursuivant à la sortie de détention, par exemple en complément d’un suivi par le SPIP en milieu ouvert en cas d’aménagement de peine. Le passage par l’IAE constitue un sas et doit servir de tremplin vers une réinsertion durable.

La mise en place d’une SIAE au sein d’un établissement pénitentiaire repose sur un partenariat entre :

  • - la structure d’insertion par l’activité économique (SIAE)
  • - L’établissement : direction, responsable des activités, officiers, surveillants
  • - le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP)
  • - la DREETS : Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités
  • - Pôle emploi et la mission locale
  • - tout intervenant au sein de l’établissement (unité sanitaire, unité locale d’enseignement).

Zoom sur les entreprises adaptées

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a permis l’implantation des entreprises adaptées (EA) en détention.
L’entreprise adaptée est une entreprise du milieu ordinaire de travail, soumise aux dispositions du code du travail, qui emploie au moins 55 % de travailleurs reconnus handicapés parmi son effectif salarié annuel.

Il s'agit de permettre aux bénéficiaires, personne en situation de handicap très éloignée de l'emploi, d'identifier ou de consolider leur projet professionnel et de les accompagner dans la réalisation de ce projet, dans l’entreprise adaptée elle-même ou en dehors. Dans cet objectif, l'EA met en œuvre le triptyque « emploi-accompagnement-formation » en tenant compte des besoins et des capacités des personnes qu’elle emploie.

deux personnes dans une entreprise adaptée

Implantées en détention les entreprises adaptées, permettent aux personnes détenues reconnues travailleurs handicapés :

  • - d’exercer une activité professionnelle dans des conditions adaptées à leurs capacités
  • - de bénéficier d’une nouvelle voie de mise en emploi associant un accompagnement social et professionnel, l’acquisition d’une expérience professionnelle et le cas échéant une formation favorisant la réalisation de leur projet professionnel en vue d’une insertion durable hors de la détention

L'EA peut également accueillir des personnes détenues ne présentant pas de situation de handicap dans un objectif de diversité des profils

Le déploiement des entreprises adaptées en détention a débuté en 2021 avec un phase pilote dans dix établissements pénitentiaires. La première entreprise adaptée, Envoi, spécialisée dans le traitement de déchets d'équipements électriques et électroniques a ouvert en décembre 2021 à Muret. La mise en place d'une EA au sein d'un établissement pénitentiaire implique plusieurs types d'acteurs :

  • - l’établissement pénitentiaire : direction, responsable des activités, officiers, surveillants
  • - l’entreprise adaptée (EA)
  • - le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP)
  • - l’unité sanitaire en milieu pénitentiaire
  • - la DREETS : Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités
  • - Pôle emploi, Cap emploi et la mission locale
  • - tout intervenant au sein de l’établissement et en particulier l’unité locale d’enseignement.
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